Le secteur de la restauration gĂ©nĂšre chaque annĂ©e 180 000 tonnes dâemballage. Parce que lâon ne se rend pas toujours compte des ordres de grandeur, on traduit pour vous : câest vraiment beaucoup ! En 2019, l’un des leaders de la restauration rapide en France produisait 1 kilo dâemballage chaque seconde. Vous voyez mieux le problĂšme ? đ§
Nos modes de vie produisent beaucoup trop de dĂ©chets. Le constat nâest pas nouveau, il est mĂȘme Ă lâorigine de Gobi. Au dĂ©part, nous voulions nous attaquer aux gobelets plastiques omniprĂ©sents dans les bureaux, puis nous sommes passĂ©s de la pause cafĂ© Ă la pause dej, de la gourde aux couverts, et Ă tous ces objets qui peuvent nous accompagner au quotidien dans une dĂ©marche anti-jetable et zĂ©ro dĂ©chet – tout en nous donnant la pĂȘche !
Câest donc en pleine rĂ©flexion sur notre future lunchbox et nos habitudes au moment du repas que nous avons voulu faire le point sur la situation actuelle dans le secteur de la restauration. Que dit la loi ? Est-elle appliquĂ©e ? Quâen disent les restaurateurs ? Quels sont les challenges quâil reste Ă rĂ©soudre ?
Cet article tente de rĂ©pondre Ă toutes ces questions đ€©
Au sommaire
- Un peu de contexte
- Une loi et ses paliers
- La mobilisation dâun secteur Ă©pinglĂ©
- Mini bilan de la situation
- Work in progress
1. Un peu de contexte sur les emballages plastiques dans le secteur de la restauration
Pourquoi nous intĂ©resser spĂ©cifiquement au secteur de la restauration ? La rĂ©ponse est simple : parce quâil est la premiĂšre source mondiale de pollution plastique de nos milieux aquatiques. Figurez-vous quâen France en juin 2021, la part de la restauration Ă emporter dans la pollution plastique de nos fleuves et ocĂ©ans est estimĂ©e entre 50 et 88% !
Ce nâest pas Ă©tonnant quand on sait que le secteur de la restauration Ă emporter ne cesse de grandir depuis les 10 derniĂšres annĂ©es. Entre 2008 et 2018, son chiffre dâaffaires a triplĂ©, rien que ça. Et on nâĂ©tait mĂȘme pas encore passĂ© par la case pandĂ©mie mondiale.
Autant vous dire que le confinement a donnĂ© le coup de grĂące : la vente Ă emporter a explosĂ©, et donc les emballages Ă usage unique et donc les dĂ©chets dans nos poubelles. Aujourdâhui, 60% des restaurants proposent des plats Ă emporter, contre 44% avant la crise. Lâeffet sur nos dĂ©chets est mathĂ©matique.
Heureusement, le problĂšme des dĂ©chets gĂ©nĂ©rĂ©s par le secteur de la restauration a Ă©tĂ© pris en compte par le gouvernement, notamment dans la fameuse loi AGECâŠ

2. Une loi et ses paliers pour limiter les emballages plastiques
En fĂ©vrier 2020, la loi anti-gaspillage pour une Ă©conomie circulaire, dite loi AGEC, est publiĂ©e. Pile un mois avant lâarrivĂ©e du Covid et la fermeture massive des restaurants. La filiĂšre de la restauration, lâune des cibles prioritaires de cette loi, est un peu chahutĂ©eâŠ
En effet, la loi fixe un objectif aussi ambitieux que nĂ©cessaire : faire disparaĂźtre tous les emballages plastiques dâici 2040. LâidĂ©e est dâavancer par paliers.
- Depuis janvier 2021, le plastique jetable est interdit (exit les petits jeux en plastique dans les menus enfants, par exemple) : fini la pĂ©riode de tolĂ©rance qui permettait encore aux restaurateurs dâĂ©couler leurs stocks de pailles, couverts jetables, boĂźtes Ă sandwich, etc.
- Depuis juillet 2021, les restaurants sont obligĂ©s dâaccepter les contenants que les gens apportent, type gourde ou lunchbox. En plus, un tarif rĂ©duit doit leur ĂȘtre proposĂ©. Bon Ă savoir ! đĄ
- Prochaine Ă©tape : janvier 2023, date Ă partir de laquelle tous les repas pris sur place dans les fast-foods devront ĂȘtre servis dans de la vaisselle rĂ©utilisable. Grande classe. đ
- A compter de 2025, les restaurateurs devront proposer des contenants réutilisables pour la vente à emporter également.
- Entre 2021 et 2025, les industriels devront supprimer 450 000 tonnes dâemballages plastique Ă usage unique pour sâapprocher de lâobjectif zĂ©ro dĂ©chet.
Petite mais importante remarque Ă cet endroit : comme vous pouvez le constater, on ne mise pas uniquement sur le recyclage ! Mieux vaut ne pas produire de dĂ©chets du tout, et donc penser rĂ©emploi. Le lavage des gourdes, lunchbox, etc. permettrait dâĂ©conomiser 33% dâeau, 76% dâĂ©nergie et dâĂ©mettre 79% de gaz Ă effet de serre en moins, dixit une Ă©tude de 2009 partagĂ©e par lâADEME.
3. La mobilisation dâun secteur Ă©pinglĂ© : les entreprises de livraison
Maintenant que lâon sait ce que dit la loi, voyons comment ce secteur de la restauration a dĂ©cidĂ© de se mobiliser. En 2021, Ă la suite de plusieurs mois de concertation, 19 entreprises de livraison de repas ont signĂ© une charte avec le ministĂšre de la Transition Ă©cologique comprenant des propositions concrĂštes pour rĂ©duire la quantitĂ© de dĂ©chets produite, dĂ©velopper le rĂ©emploi et amĂ©liorer le recyclage.
Au risque de vous mĂ©langer les pinceaux dans les deadlines đ voici les engagements spĂ©cifiques Ă ces acteurs de la livraison :
- un objectif de 50% des emballages livrĂ©s sans plastique Ă usage unique dâici le 1er janvier 2022 puis 70% au 1er janvier 2023
- la fin de la livraison systématique de couverts et de sauces dÚs le 1er mars 2021
- le lancement de 12 expérimentations de réemploi des contenants pour plats, notamment des dispositifs de consigne
- un objectif de 100 % dâemballages recyclables au 1er janvier 2022
Chez Gobi, on a aussi collaborĂ© avec Eau de Paris et Food ChĂ©ri pour proposer des gourdes (la Gobi Street) Ă tous ceux qui, au moment de passer commande, prĂ©fĂšrent lâeau du robinet pour accompagner leur menu.
Du coup, quâest-ce que ça donne aujourdâhui sur le terrain ?
4. Mini-bilan de la situation
LâĂ©quipe de lâassociation No Plastic In My Sea a fait le travail de vĂ©rification pour nous. LâONG a consultĂ© prĂšs de 40 enseignes de restauration Ă emporter et rendu visite Ă plus de 100 restaurants. En novembre 2021, leur verdict est⊠âpeut mieux faireâ.

Sur les 42 chaĂźnes contactĂ©es, elles ne sont que 6 Ă avoir rĂ©pondu (McDonaldâs, Starbucks, Exki, Paul, Pomme de pain et Steakân Shake). Dans 70% des cas, les contenants rĂ©utilisables pour les plats sont refusĂ©s. Les gourdes ne sont pas acceptĂ©es dans 60% des enseignes (chez Gobi, ça nous rend encore plus combatifs !). Et seulement 5 restaurants proposaient une rĂ©duction aux personnes dotĂ©es dâune gourde, variant de 5 Ă 50 centimes, ou bien de 5 Ă 10% de lâaddition.
Comment expliquer ces difficultés ?
5. Work in progress
Lâapplication de la loi nâest pas toujours une mince affaire. On souhaite bonne chance Ă qui voudra imposer son tupperware au magasin de sushis, au kebab ou au traiteur du coin⊠Ăvidemment, on y croit ! Mais force est de constater que le parcours pour les entreprises du secteur nâest pas Ă©vident.
Comment bien recycler ? Comment trier ?Â
La premiĂšre difficultĂ© est quâil ne suffit pas dâen finir avec le jetable et dâimposer le recyclage. Entre les deux, lâĂ©tape du tri pose problĂšme. Les restes alimentaires dans les emballages ne permettent pas toujours le recyclage, mĂȘme quand ils sont triĂ©s. Et les dĂ©chets insuffisamment triĂ©s finissent incinĂ©rĂ©s ou enfouis.
SpĂ©cifiquement sur le dĂ©ploiement du tri, 16 enseignes de la restauration rapide se sont engagĂ©es en 2019 Ă communiquer chaque semestre leur avancement en la matiĂšre. En 2021, le bilan dâĂ©tape a montrĂ© que seules 3 enseignes avaient rĂ©ussi Ă atteindre les objectifs fixĂ©sâŠ
Par quoi remplacer les plastiques ?
La deuxiĂšme difficultĂ© apparaĂźt quand il sâagit de substituer le plastique par du carton ou des fibres vĂ©gĂ©tales. Rappelez-vous, le matĂ©riau Ă©cologique nâexiste pas ! Un changement de composants entraĂźne bien souvent dâautres problĂšmes, comme des importations qui favorisent la dĂ©forestation, la prĂ©sence dâun pelliculage plastique qui reste nĂ©cessaire pour impermĂ©abiliser, des chaĂźnes de recyclage qui ne sont pas pensĂ©es pour ces matiĂšres⊠Ce sont prĂ©cisĂ©ment ce genre de phĂ©nomĂšnes que lâon essaie dâanticiper dĂšs la conception en analysant dâemblĂ©e le cycle de vie complet de chaque produit.
La réorganisation a un coût
TroisiĂšme difficultĂ© : le casse-tĂȘte de la rĂ©organisation et le coĂ»t du changement. Voyons un exemple concret. Un journaliste est allĂ© creuser le sujet chez un restaurant libanais dont la vente Ă emporter prĂ©sente 10% du chiffre d’affaires et le coĂ»t de lâemballage 10 000 euros par an. Il a dĂ©cidĂ© de proposer des emballages rĂ©utilisables sous forme de consigne. Mais comment bien estimer le nombre d’emballages Ă commander ? Comment planifier la main-d’Ćuvre pour le nettoyage de ces rĂ©cipients ? Comment rĂ©organiser lâactivitĂ© pour continuer Ă respecter les normes dâhygiĂšne ? Selon ses calculs, lâinvestissement sera rentabilisĂ© au bout de 3 ans : 22 500 ⏠une fois vs. 10 000 ⏠chaque annĂ©e.
Et la consigne dans tout ça ?
Comme vous venez de le voir avec notre exemple de restaurant libanais, la consigne est lâune des solutions les plus plĂ©biscitĂ©es pour faire changer les usages. Mais ce genre de changement, ça sâaccompagne. Certains acteurs proposent un accompagnement aux entreprises (industriels, restaurateurs, marquesâŠ) dĂ©sireuses de se lancer, câest le cas de La Consigne Green Go par exemple, ou de lâassociation RĂ©seau Consigne, ou encore de lâassociation Ăcotable. Certaines villes prennent aussi les choses en main, en proposant des rĂ©seaux de consigne, comme par exemple Ă Toulouse avec lâassociation ETIC emballages. Et il y en a plein dâautres Ă travers la France !

La mise en place dâune filiĂšre ResponsabilitĂ© Ălargie du Producteur pour les emballages en restauration (REP ER)
Toutes ces associations lâont bien compris : ce nâest pas simple de devoir affronter la problĂ©matique du cycle de vie complet des emballages. Dâautant que la loi AGEC, elle, prĂ©voit une filiĂšre dite ResponsabilitĂ© Ălargie du Producteur pour les emballages en restauration, dâaprĂšs le principe du pollueur-payeur.
ConcrĂštement, les entreprises qui mettent sur le marchĂ© des emballages sont responsables de comment ces emballages sont conçus et de ce quâils deviennent, de lâensemble du cycle de vie, donc. SacrĂ© challenge pour un restaurateur de se mettre Ă rĂ©flĂ©chir Ă la prĂ©vention des dĂ©chets et au rĂ©emploi de ses emballages ! La question de lâĂ©ducation et de lâaccompagnement de cette filiĂšre est centrale pour quâelle puisse bien fonctionner le 1er janvier 2023.
Câest peut-ĂȘtre bien dans cette idĂ©e de filiĂšre, en tout cas dans une logique collective, que se trouve selon Gobi la clĂ© du changement ! Sortir du jetable au profit du recyclage et surtout du rĂ©emploi, cela passe par toute une infrastructure, oĂč les entreprises autant que les particuliers ont un rĂŽle Ă jouer. Pour soutenir la stratĂ©gie 3R – RĂ©duction, RĂ©emploi et Recyclage – Ă©quipons-nous, chez nous comme au bureau ! Chez Gobi, on veut bien vous filer un coup de main đ
Tiens, et si vous commenciez par nous donner votre avis sur la lunchbox idéale ?