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Éco-conception et Analyse du Cycle de Vie : comment diminuer l’impact des biens de consommation ?

Bioplastique, bio-sourcé, biodégradrable, recyclable… De plus en plus de produits se revendiquent éco-responsables, sans que l’on ne sache toujours ce que cela signifie vraiment. Comment s’y retrouver pour décrypter ces tendances grâce à l’analyse de cycle de vie ?

En tant qu’adepte du sujet, nous nous sommes associés à makesense – une structure aussi engagée que Gobi qu’on vous invite à découvrir ! – pour organiser deux webinaires passionnants sur cette première étape de l’économie circulaire. On vous partage le meilleur de nos échanges.

Le changement par l’objet via l’éco-conception

L’éco-conception, c’est le fait de réduire l’impact global d’un produit, de sa création à sa fin de vie. C’est une méthode qui permet de réduire les externalités négatives d’un produit et d’augmenter les services rendus par ce produit. L’enjeu est à la fois environnemental, technique, économique et humain.

Pour comprendre le sujet, nous avons réuni autour de la table l’Institut National de l’Economie Circulaire (INEC), l’ADEME, la Coopérative Mu, Michelin, Diam, l’agence Hyssop et Les Collectifs (rien que ça !) pour avoir leurs retours d’expérience sur le sujet.

Voici les 3 enseignements à retenir :

1. Il n’existe pas de bon ou mauvais matériaux, tout dépend de l’usage

Lorsqu’une entreprise se lance dans l’éco-conception, la première étape est de choisir les bons matériaux. N’oublions pas, il n’y a pas d’éco-matériaux en soi ! Attention au plastique bashing ou la recherche à tout prix de matières dites “naturelles” ! Pour la Coopérative Mu, seul un travail de recherche peut déconstruire les préjugés liés à certains matériaux. L’impact d’un objet et d’un matériau doit être déterminé par une démarche scientifique et rigoureuse. Il dépend du cycle de vie du produit, de son utilisation finale et sa durée de vie. Il ne peut en aucun cas être déterminé à des fins de « communication » (ex : matière « bio » qui enverrait un message positif au consommateur).

Florence Baitinger, co-fondatrice de Gobi, insiste notamment sur l’importance de l’usage et de la durée de vie moyenne de l’objet pour choisir les bons matériaux. En entreprise, les salariés gardent en moyenne une gourde entre 1 et 2 ans et certaines ne seront pas utilisées. Il faut donc privilégier des matières premières avec un impact de fabrication environnemental suffisamment bas pour que le coût environnemental de l’ensemble des gourdes distribuées (celles qui seront conservées et celles qui le seront moins) reste faible. Pour mieux comprendre notre choix de fabriquer en copolyester et déconstruire certains préjugés sur ce matériau, nous vous conseillons de lire notre article de blog : Le plastique écologique, ça existe ?

De son côté, Christophe Stevens, responsable prospective de Michelin, rappelle que certains matériaux biosourcés peuvent être pires que les matériaux classiques qu’ils remplacent à cause de la déforestation qu’ils génèrent. Par exemple, pour une même quantité de matière, la production de certains matériaux biosourcés nécessite une surface beaucoup plus importante. Il faut donc être vigilant en prenant en compte les impacts des matériaux mais aussi leur contribution à l’impact global du produit : un pneu bien conçu peut contribuer à faire baisser la consommation de carburant du véhicule, et ça, ça compte aussi !

2. L’étude du cycle de vie, une étape clé dans l’action

Observer le cycle de vie d’un objet permet d’identifier les étapes sur lesquelles agir en priorité (sur les matières premières, sur la fabrication, sur l’utilisation, etc.). Chez Diam, qui propose des solutions de vente et de merchandising, 40% de l’impact environnemental vient par exemple des achats matières. Mathieu Parfait, leur responsable RSE, a décidé d’agir en remplaçant le plastique vierge par du plastique recyclé. Pour cela, l’entreprise a acheté des machines pour broyer et recycler le plastique sur le site de fabrication. C’est un co-investissement avec un de leurs clients, chez qui ils viennent chercher les anciens mobiliers pour les recycler et les réutiliser dans la fabrication.

Le saviez-vous ? 80% de l’impact d’un produit est déterminé au moment de sa conception.

3. Le secret de la réussite ? Faire participer ses équipes

Tous les intervenants ont été confrontés à cette difficulté : comment impliquer ses collaborateurs dans une démarche d’éco-conception ? L’une des solution est de s’appuyer sur des collectifs. Les Collectifs, c’est justement le mouvement qu’a fondé Quentin Bordert il y a 2 ans pour sensibiliser les salariés à la transition écologique et sociale. Le réseau facilite la création de collectifs en entreprise pour les transformer de l’intérieur. Comment ? En mettant en place des actions visibles pour montrer l’exemple et intéresser d’autres collègues. Le résultat est double : les bonnes pratiques au bureau améliorent l’impact environnemental des salariés et font évoluer la stratégie de l’entreprise. La sensibilisation des collaborateurs se répercute ensuite dans leur manière de travailler et d’aborder leur métier.

éco-conception et analyse de cycle de vie un travail collaboratif

Un autre exemple ? Chez Michelin, Christophe Stevens et son équipe ont mis au point des ateliers de prospective permettant de prendre en compte les limites planétaires. Ils accompagnent les différents métiers du groupe à définir leur stratégie future avec ces méthodes. Et ces ateliers collectifs commencent à porter leurs fruits ! Les différents collaborateurs ont été sensibilisés aux bases de l’éco-conception, à analyser l’impact global d’un produit mais aussi à prendre en compte les évolutions du secteur. Cette démarche permet de penser de nouveaux services et produits hors du cadre classique. Résultat de cette approche : Michelin a lancé récemment des voiles gonflables pour bateaux cargo afin de diminuer l’impact du transport maritime. Chez Gobi, on adore !

L’Analyse du Cycle de Vie, par où commencer ?

Suite aux nombreuses questions qui nous ont été posées lors du premier webinaire, nous avons décidé d’approfondir le sujet de l’analyse environnementale concrète d’un produit ou d’un service. Nous vous partageons les étapes clés pour se lancer :

Etape 1 : choisir la bonne méthode

Il existe une vingtaine de méthodes d’évaluations environnementales, répertoriées dans le Panorama des méthodes, Chaire Elsa Pact. Avant de se lancer, il faut se demander quelle méthode correspond le mieux à son projet. Ici, nous avons choisi de nous focaliser sur l’Analyse du Cycle de Vie qui est l’une des principales méthodes utilisées dans les entreprises, et qui a été développée il y a plus de 30 ans.

Etape 2 : comprendre l’ACV et pourquoi la faire

Clara Tromson (ADEME) rappelle que l’ACV est une méthode multicritères qui permet d’évaluer l’empreinte environnementale d’un produit ou d’un service. Cet impact est souvent dur à évaluer, notamment en raison de la difficulté à rassembler des informations fiables sur les différentes étapes (de l’extraction des matières premières à la fabrication en passant par le transport, la distribution et le recyclage). 

L’ACV a pour but : 

  • d’aider à la prise de décision, en identifiant quelles sont les sources d’impact d’un produit,
  • d’éviter les transferts d’impact, lorsque l’on veut améliorer l’empreinte environnementale d’un produit.

Elle est très souvent utilisée dans les démarches d’éco-conception, pour la communication environnementale, pour le développement de stratégies, ou bien encore pour valider la plus-value environnementale de projets. Grâce à ses données concrètes, elle va être utilisée pour :

  • convaincre ses fournisseurs de l’impact dont ils sont responsables et les aider à s’améliorer,
  • engager ses équipes autour d’actions RSE dont l’impact est mesuré,
  • sensibiliser les consommateurs et les faire s’interroger sur l’impact d’un produit ou service.

Cela doit permettre à chacun (fournisseur, fabricant, distributeur, consommateur…) de comprendre l’impact de ses décisions sur le reste de la chaîne de valeur et d’éliminer les petites optimisations individuelles qui nuisent à l’impact global du produit. C’est une manière factuelle de réunir autour de la table toutes les parties prenantes et les faire agir sur des données mesurées. Car les consommateurs et les industriels méconnaissent l’impact environnemental de ce qu’ils consomment et produisent ! On vous recommande de lire le rapport de l’ADEME, La face cachée des objets, pour vous en rendre compte.

Pour Dominique Royet, de l’agence Hyssop (conseil en RSE), il est important de savoir vulgariser une ACV pour que ce document technique puisse se transformer en actions concrètes dans l’entreprise. L’ACV permet de savoir où agir pour avoir le meilleur impact. Et pour cela, « il faut réussir à convaincre l’ensemble de la chaîne de production de faire différemment ».

Vous n’avez pas les moyens de réaliser une ACV pour tous vos produits ? Choisissez un produit cœur de gamme, et appliquez ses enseignements à l’ensemble de votre gamme ! Vous aurez déjà un impact conséquent.

L’ACV peut permettre à une entreprise de s’améliorer sur l’ensemble de ses produits, et même sur son business model.

Etape 3 : se lancer !

Pour Mathilde Sussan, de la coopérative Mu, démarrer une démarche d’ACV demande de définir des objectifs et un champ d’étude précis. Que va-t-on étudier précisément, quelle est la référence en terme d’usage ? Ensuite, on regarde les différentes étapes du cycle de vie et les matériaux utilisés pour la fabrication du produit. Enfin, on analyse et interprète les résultats, qui permettent de retravailler sur la conception des produits. 

Idéalement, l’ACV se fait en amont du développement d’un produit, puis tout au long du projet. Cela permet d’arbitrer entre les différentes options et de prioriser les actions les plus pertinentes.

Pour réaliser une ACV, il faut commencer par interroger les différents fournisseurs et modéliser les données sur un outil, tel que SimaPro, ou encore la Base IMPACTS de l’ADEME (gratuits). 

Florence Baitinger, de Gobi, explique qu’une fois les données compilées, il faut ensuite transformer les datas d’usage en impact environnemental. Gobi a par exemple calculé et mesuré combien coûte à la planète l’utilisation de gobelets et bouteilles jetables au bureau, puis l’a traduit en impact environnemental. « Grâce à cela, nous pouvons dire que le bénéfice d’utilisation de nos produits est supérieur à l’usage de gobelets et bouteilles jetables en seulement quelques mois. »

Extrait de l'Analyse de Cycle de Vie du Gobi Original, issu de la synthèse d'éco-conception
Extrait de l’Analyse de Cycle de Vie du Gobi Original, issu de la synthèse d’éco-conception

Nous devons construire de nouveaux imaginaires !

Pour que l’éco-conception et les méthodes associées se diffusent, il y a encore du boulot ! Alors, par où commencer ? Par déconstruire les préjugés sur certains matériaux et repenser la chaîne de valeur d’un produit. Même pour les entreprises les plus avancées, il y a toujours des pistes d’amélioration possibles (nouvelles filières de recyclage, boucles courtes…). Mais ce qui permettra vraiment d’aller plus loin, c’est la construction de nouveaux imaginaires. Les produits éco-conçus doivent devenir la nouvelle norme et séduire le plus grand nombre. Et ça, Gobi l’a bien compris ! Les produits de demain devront être beaux et joyeux pour être aussi durables qu’attractifs.

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Pour revoir les 2 webinaires :

Pour avoir plus d’informations sur l’éco-conception, retrouver des formations, demander une aide financière ou bénéficier d’un bilan éco-conception, vous pouvez aller sur le site de l’Ademe

Pour démarrer une démarche d’ACV, vous pouvez contacter l’agence d’éco-conception Mu qui a accompagné de nombreuses entreprises (Gobi, Louis Vuitton, Kenzo, Conforama, Decathlon) à penser de nouveaux produits ou à revoir des produits existants. 

Et enfin, pour vous faire accompagner dans votre ACV, vous pouvez contacter l’agence de conseil en RSE Hyssop !

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