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100% made in France, mythe ou réalité ? Ce qu’il faut retenir de notre webinar sur la relocalisation

On ne change pas une équipe qui gagne. Avec Makesense, nous avons organisé mi-novembre un quatrième webinar – après ceux sur l’éco-conception et celui sur les labels – pour parler d’un autre sujet qui nous tient à cœur : la relocalisation. 

[Pour visionner et écouter le webinaire comme si vous y étiez, c’est par ici :

Sinon, nous vous résumons l’essentiel dans cet article !]

Aujourd’hui, 22% des Français prennent systématiquement en compte le pays de fabrication lors de leurs achats (sondage IFOP pour Origine France Garantie de février 2022). Le made in France est devenu un argument de vente majeur. De plus en plus d’entreprises revendiquent une production tricolore… 

Mais produire en France à 100%, du premier recrutement à la dernière livraison, est une décision forte, qui correspond à un vrai challenge en termes de temps et d’argent. Alors nous étions curieux de faire le point avec ceux qui, comme nous, le vivent au quotidien.

Autour de la table, il y avait : 

Gilles Attaf, président d'Origine France Garantie

Gilles Attaf d’Origine France Garantie, LA labellisation qui certifie aujourd’hui le made in France. Elle était justement le sujet d’un article dédié sur notre blog. 

Le saviez-vous ? Depuis cette année, le Gobi Indoor est certifié OFG ! Toute notre gamme pourrait y prétendre, car elle repose sur une fabrication locale, l’un de nos engagements depuis la création de Gobi. Nous avançons pas à pas 🙂

Diane Roubert, fondatrice de TWYD

Diane Roubert de TWYD, pour “The Way You Drink”, un cousin de Gobi en quelque sorte, puisque cette entreprise propose des fontaines à eau made in France aux établissements publics (vous vous rappelez de la loi AGEC ?).

Gaston Dufay, Les petits solides

Gaston Dufay de Les Petits Solides, une toute jeune TPE et marque d’artisan lyonnaise spécialisée dans la cosmétique naturelle solide. 

Samuel Degrémont, co-fondateur de Gobi

Samuel Degrémont, co-fondateur de Gobi, ça vous dit quelque chose, non ? 😉

Kareen Maya Levy de Kippit

Kareen Maya Levy de Kippit qui a pour vocation de produire de l’électroménager fabriqué en France, durable, responsable et réparable. Si l’industrialisation a hélas échoué, l’engouement des consommateurs pour ce projet s’est amplement vérifié. 

Nicolas Thebaud de chez Lemahieu

Nicolas Thebaud de Lemahieu, fabricant français de vêtements depuis 75 ans, spécialisé en maille fine. Ils produisent par exemple pour Le Slip Français.

Au programme du webinar : 

  1. Quel est l’impact de la relocalisation ? Quelles sont les motivations qui nous poussent à privilégier le Made in France, en tant qu’entreprise et en tant que consommateur ?
  1. Quels sont les obstacles à la relocalisation ? Quels sont les retours d’expérience des entreprises qui se sont lancées dans l’aventure du Made in France ?
  1. Comment faire pour relocaliser son activité et passer au 100% Made in France ? Quels sont les conseils que l’on peut donner aux entreprises, jeunes et moins jeunes, pour passer le cap ?

1. Quel est l’impact de la relocalisation ? Les motivations qui nous font agir.

Choisir de localiser son activité en France, ça fait toute la différence. En voici pour preuve les multiples impacts positifs.

  • L’impact écologique : produire en France est nécessairement synonyme de circuit court – plus court que lorsque l’on fait venir des pièces détachées de l’autre bout de la planète. Moins de transport, moins de stockage… l’empreinte carbone des produits Made in France est tout simplement plus réduite. C’est du bon sens.
  • L’impact social et le respect de conditions de travail dignes : les Français l’ont bien compris, puisque 92% d’entre eux considèrent qu’acheter made in France est une manière de soutenir les entreprises françaises et ainsi de maintenir l’emploi en France. Pour chaque activité relocalisée, des savoir-faire se perpétuent et des emplois sont pérennisés. Parfois, il s’agit d’emplois inclusifs, qui permettent la réinsertion de personnes en situation de handicap ou de réinsertion professionnelle. C’est le cas de Gobi !
Esat de Rosebrie
  • L’impact en termes de confiance : produire en France signifie être transparent sur ses circuits et permet d’établir une relation de confiance avec ses partenaires et ses clients. La qualité est traçable, vérifiable à chaque étape de production. Zéro opacité.
  • L’impact en termes d’éducation : produire en France pousse à s’expliquer, à justifier, à argumenter en faveur d’un changement de nos habitudes de production – et au final, de consommation. Montrer que le 100% made in France est possible, c’est un super vecteur de motivation !
  • L’impact en termes de communauté : produire en France, c’est rejoindre un référentiel commun qui permet de construire ensemble. Pouvoir échanger de vive voix avec des professionnels à proximité, aller rencontrer en vrai ce partenaire industriel à Bourges ou Raon l’Etape, ça change tout. L’émulation lors du dernier salon du Made in France l’a mille fois prouvé.

2. Quels sont les obstacles au made in France ? Les retours d’expériences et les conseils pour relocaliser

Même si le made in France gagne du terrain, notamment chez les jeunes entreprises qui débutent, il est loin d’être le mode de fonctionnement majoritaire. En voici quelques raisons.

  • Une question de savoir-faire. Parfois, tout produire en France devient un casse-tête… français ! Tout simplement parce qu’une technique de production indispensable à la réalisation du produit n’existe pas dans l’hexagone. L’exemple de Kippit était particulièrement parlant : proposer une bouilloire à double paroi en inox fabriquée en France est aujourd’hui impossible, car ce savoir-faire n’existe qu’en Asie. Aucune étude de faisabilité n’a abouti. Chez Gobi, on connaît bien le problème, c’est l’une des raisons pour lesquelles nous ne proposons pas de gourde isotherme (même principe de double paroi). Pour acquérir ces compétences, il faudrait des investissements colossaux…
  • Un problème de main d’œuvre qualifiée. C’est tout à fait lié à notre premier point concernant le savoir-faire. A trop s’habituer à ce que certains produits ou composants soient produits hors de France, la main d’œuvre qualifiée disparaît. Lemahieu a par exemple fait un gros travail de revalorisation et de formation, pour prouver que “l’usine textile” avait changé et reposait sur des postes de travail tout sauf monotâches. RH, le made in France a besoin de vous !
  • Une relation inégale entre petites start-ups vs. acteurs installés. Proposer un produit made in France suppose souvent de trouver les bons partenaires sur le sol français. Le hic : entre la start-up fougueuse et les grands groupes industriels bien installés, trouver un terrain d’entente n’est pas toujours facile. Pourtant, d’après l’expérience de TWYD (ravi de son partenariat avec une tôlerie bretonne historique), tout n’est pas perdu : “Il y a une envie chez ces industriels de changer, d’aller vers des projets qui ont du sens et de diversifier leurs produits.”
  • Un temps de développement incompressible. Produire en France et rien qu’en France, c’est être dépendant des compétences, du temps et de la bienveillance de ses partenaires. Le temps de développement, entre le chiffrage des outillages, de la pièce puis du prix de vente, est souvent très long. Côté Gobi, il a fallu 4 ans aux fondateurs avant d’être à temps plein sur la gourde. Autant dire qu’il faut garder confiance, avoir les reins solides financièrement et savoir se projeter !
  • Le coût des matières premières et de l’énergie. Le contexte actuel complique forcément aussi les choses pour les entreprises engagées dans une production 100% française. Le travail sur les coûts devient encore plus exigeant : comment faire pour optimiser tel emballage, modifier la forme de tel produit pour le rendre moins gourmand en telle matière… Essayer de compenser les hausses vertigineuses sans entamer la qualité, c’est un sacré défi.
  • Le prix ! Un produit trop cher ne se vendra pas. Comment alors trouver le juste prix d’un produit made in France, nécessairement plus cher qu’un concurrent made in China ? C’est l’une des questions cruciales pour toutes les entreprises localisées en France. Il faut prouver sa valeur ajoutée sans relâche, en naviguant sur une ligne de crête. En effet, 39% des Français sont prêts à payer 5% plus cher si le produit est fabriqué en France. 23% de 5 à 10% plus cher et 5% de 10 à 20% plus cher. Il faut sortir les calculettes et faire preuve de créativité…
Le prix !

Comment passer au 100% made in France ? Les meilleurs conseils

Non, passer à une production 100% française n’est pas une mince affaire. Mais des solutions et des conseils existent pour poursuivre cet engagement vertueux. La preuve.

  • Expliquer. Misez sur la valeur ajoutée de votre produit ou de votre service, en le faisant parler. Son histoire, sa différence et ses qualités méritent d’être racontées, encore et encore.
  • S’appuyer sur le réseau. Sachez que vous pouvez compter sur le relais d’une communauté mobilisée et mobilisable. L’entraide est réelle. En matière de “made in France”, la victoire de l’un et la victoire de l’autre. C’est la conviction de Les Petits Solides. Et c’est aussi l’expérience de TWYD : leur partenariat avec un grand industriel breton a abouti parce qu’une autre petite entreprise avait ouvert la voie avant eux. Face au succès de l’opération, l’industriel n’avait pas hésité à leur faire confiance. Un pour tous, tous pour un.
Un pour tous, tous pour un !
Un pour tous, tous pour un !
  • Éduquer ses partenaires. Sensibilisez-les à vos contraintes, souvent bien différentes des leurs. Dans l’idéal, institution ou grand groupe devraient apprendre à être plus réactifs dans leurs prises de décisions, pour éviter aux start-ups de rester dans un flou prolongé… et coûteux. Synchronisons-nous ! 
  • Engager les pouvoirs publics. C’est une bataille de tous les instants. En témoignent ceux qui la mènent de front, comme l’équipe d’Origine France Garantie. Soutenir le Made in France, non seulement dans les discours, mais dans des aides et subventions concrètes – en voilà un bel objectif, non ? 
  • Investir dans les savoir-faire. Alors oui, cela demande du temps et de l’argent. Mais sans la réimplantation et la valorisation de certains outils et savoir-faire stratégiques, la production en France restera un vœu pieux. 
  • Interroger son business model. Pour être le plus résilient possible, interrogez votre stratégie commerciale. Quel panachage est possible entre le B2B et le B2C ? Comment diversifier son activité pour réduire sa dépendance vis-à-vis de certains clients ? Lemahieu, par exemple, a su tirer son épingle du jeu en créant ses marques propres, le rendant capable de compenser la perte de clients en période creuse.
  • Aller chercher les aides disponibles. Celles à la création d’entreprise. Celles proposées par les régions. Toutes méritent d’être explorées et sollicitées. C’est un investissement en énergie qui en vaut la chandelle.
  • Ne rien lâcher. Soyez coriace, pugnace et ne vous découragez jamais – ce conseil, nous l’avons beaucoup entendu lors du webinaire et nous ne pouvons qu’opiner du chef. Pour convaincre, il faut être convaincu. 

A la fin de ce webinaire sur la relocalisation, nous avions presque envie de le re-programmer chaque année, tant la problématique du made in France se joue sur le temps long. C’est une nouvelle vision de nos modes de production qu’il s’agit d’installer. A nous de mettre en lumière la convergence de tous nos enjeux actuels – sociaux, technologiques ou écologiques – dans le made in France. Il constitue une réponse incontournable pour avancer vers un futur désirable.

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